Souris de FRAMBOISE
en cueillette de fraises
– Avant, tu faisais à manger. D’ailleurs, c’est bien comme ça que tu m’as séduite ! Tu te souviens, le tiramisu, comment il a fini ? Tu pourrais faire le dessert, ce soir… Moi j’ai aucune idée. J’ai envie que tu m’étonnes…
Il restait debout dans la véranda, son téléphone éteint à la main, plein de traces de doigts sur l’écran noir. Comme une grenade dégoupillée dont on ne sait pas comment se débarrasser… Pour le dîner, il y aurait Arthur, un collègue de sa femme et Leila, la fleuriste voisine.
Il s’introduisit dans le congélateur, entre des petits pois et une demi-baguette embuée dans son sac. Il atteignit victorieusement un bac de sorbet, framboise. Bon, c’était déjà quelque chose.
À l’étage en dessous, dans le frigo, il y avait des fraises – des garriguettes. C’est lui qui les avait achetées. Hier, en sortant du métro.
Il les lava rapidement et les coupa en deux, puis les abandonna dans leur passoire en plastique vert. Il remplit d’eau froide une petite casserole, prit un sachet d’agar agar de 4 grammes et n’en garda que la moitié (plier une feuille de papier, y étendre la poudre en une ligne régulière, la couper au milieu, faire tomber une moitié dans la casserole et ranger l’autre dans son sachet). Il donna un bouillon, ajouta le miel et laissa reposer…
Du rouge, du rose violacé, quelques éclats de vert ; trop contrasté, violent, quasi obsessionnel ! Glacial. Il manquait une touche chaleureuse. Du jaune, du doré… C’est là qu’il l’aperçut, le gros pain devant lui. Il attrapa le couteau et tailla sauvagement 4 belles tranches. D’ici ce soir, elles auraient le temps de sécher un peu. Surexcité, il cassa des œufs dans un saladier, ajouta le sucre et se mit à fouetter en faisant couler le lait dessus peu à peu; ça blanchissait et le niveau montait… ça le calmait, de fouetter.
Il disposa les fraises coupées dans 4 ramequins, laissa tomber dessus la menthe ciselée et les remplit presque à ras bord avec le liquide de la casserole qui avait refroidi. C’était tiède maintenant.
Il se sentait de meilleure humeur. Puisqu’il était lancé, il allait faire tout le repas… Un gratin de potimarron au curry de Madras, avec de fines tranches de bacon et du lait de coco. Pour l’entrée… il devait réfléchir.
Le soir, quand ils en seraient au dessert , il sortirait du frigo les assiettes, avec un médaillon de fraises démoulé sur chacune d’elles, il ferait chauffer une grande poêle avec un morceau de beurre et jetterait dedans les tranches de pain qu’il aurait mises à tremper dans la pâte, cinq minutes plus tôt. Grillées et posées croustillantes, là, contre les fraises, dans chaque assiette. Et une quenelle de sorbet à côté. Un peu de déco. Ils seraient tous à ses pieds…
Ensuite, ce serait à elle, de l’étonner.
faites votre marché:
Médaillons : Fraises (500g), miel (50g), agar-agar (2g), menthe fraîche, eau (500g).
Pain perdu : lait (250 g), œufs (3), sucre de canne (50g), pain (1 tranche par personne)
Sorbet framboise. Déco: miel liquide, graines de pavot.
L’œil du photographe: Un ciel couvert, une lumière tout en douceur de type lumière du jour, recrée en studio. De légers reflets pour bien « asseoir » les ingrédients sur le fond tout en gardant une impression de légèreté et de fraîcheur. Stylisme Florian Garnier, ©photo et textes Jean-Michel Renaudin
Merci à Hubert de l’agence Conjoncture pour la « cueillette de fraises »… (hubert.delamare@conjoncture.fr)